Tugues et l’effet magique du velours

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« Essayez de refroidir ces petits chiens, ils ne pourront pas briller par cette chaleur ». C’est l’instruction donnée par le grand maître Joan Giner, chef de l’atelier de la légendaire pâtisserie Mora à Barcelone, à un tout jeune Rafael Tugues, le début d’une histoire peu connue qui raconte comment a été découverte la technique de l’effet velours en chocolat, aujourd’hui utilisée dans le monde entier.

C’était une chaude journée du début avril 1963, peu avant Pâques. À cette époque, les pièces de chocolat étaient humidifiées et polies à la main pour les faire briller. Suivant l’ordre du maître, Tugues a mis les figurines susmentionnées (les chiots et les chatons Disney faisaient fureur) dans le congélateur. Le jeune apprenti est allé déjeuner et n’a plus pensé aux pièces pendant quelques heures. Lorsque les chiots ont été sortis du congélateur, ils étaient manifestement gelés. Après l’inévitable agitation, ils se sont mis à peindre les pièces encore très froides avec du chocolat chaud. La surprise a été grande lorsqu’ils ont vu comment la surface des figures s’est hérissée d’un effet de velours magique jamais vu auparavant.

C’est ainsi qu’un accident imprévu a conduit à une découverte qui a fini par révolutionner l’esthétique et l’art de la présentation en pâtisserie artisanale. Ce n’est pas un hasard si cela s’est passé à Barcelone et à une époque d’effervescence artistique autour du chocolat.

Aujourd’hui, 43 ans plus tard, cet heureux oubli du grand Rafael Tugues fait l’objet d’une étude exhaustive par le Groupe de recherche en cristallographie (GRC) de l’Université de Barcelone (UB). La science explique, documente et certifie aujourd’hui ce que les merveilleux chocolatiers d’il y a presque un demi-siècle attribuaient à la magie, cette magie qui a toujours fait partie de l’essence même de la pâtisserie et qui la rend si particulière. Et ce n’était pas en France, ni en Belgique, ni en Suisse. C’était à Barcelone. Merci Rafael.

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